Si vous envisagez de vivre de l’écriture, vous vous demandez sans doute sous quel statut administratif et régime fiscal, vous pourrez le faire. Nous allons tenter de répondre à cette question en nous intéressant dans un premier temps au cas des droits d’auteur. Les autres types de revenus feront l’objet d’un nouvel article.
Droits de l’auteur et droits d’auteur
D’après l’article L111-1 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) de 2017,
« L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous.
Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial, qui sont déterminés par les livres Ier et III du présent code. »
Le droit moral est « perpétuel, inaliénable et imprescriptible » d’après le CPI. Par contre, les droits patrimoniaux (droit de reproduction et droit de représentation) peuvent être cédés à un tiers pour exploitation. C’est que fait l’auteur en signant un contrat d’édition dans ce qu’il est convenu d’appeler l’édition « à compte d’éditeur » ou « édition classique ». En échange, il perçoit une rémunération sous forme de « droits d’auteur », c’est à dire un pourcentage sur les ventes (voir article précédent). L’éditeur devient alors le propriétaire exploitant du texte et prend à sa charge l’investissement nécessaire à sa publication.
Dans le cas de l’édition « à compte d’auteur », l’auteur exploite lui-même ses droits patrimoniaux en faisant appel à un prestataire pour la production, distribution et diffusion de l’ouvrage. Enfin, « l’autoédition » permet à l’auteur de prendre en charge toute la chaîne du livre (voir l’article sur le sujet). Cette forme d’édition s’est développée avec l’avènement du numérique et d’Internet. Dans ces deux derniers cas, les revenus perçus n’entrent pas dans la définition des droits d’auteur.
Revenus assimilés à des revenus artistiques et revenus accessoires
– Revenus assimilés
L’auteur peut être rémunéré en droits d’auteur pour les activités suivantes : lecture publique par l’auteur, bourse de création ou d’écriture, bourse de résidence (si l’auteur consacre au minimum 70 % de son temps à un travail de création), prix et dotation.
– Revenus accessoires
Les auteurs affiliés à l’AGESSA (Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs – voir plus loin) peuvent, sous conditions, être rémunérés en droits d’auteur au titre des revenus accessoires pour : les rencontres publiques et débats en lien avec l’œuvre de l’auteur; les ateliers d’écriture (limités à 3 ou à 5 par an selon les cas).
La SGDL a publié une brochure très complète sur le sujet, intitulée « Comment rémunérer les auteurs ?«
Couverture et cotisations sociales
La couverture sociale des auteurs est assurée par l’AGESSA. Le Guide des auteurs de livres 2017 explique page 47 que « L’ensemble des auteurs de livres cotisent proportionnellement à leurs revenus en droits d’auteur, et ce, dès le premier euro perçu, mais ce sont les « diffuseurs » de leurs oeuvres qui prélèvent les cotisations sociales obligatoires du montant des droits d’auteur dus et les reversent, pour leur compte, à l’AGESSA (système du précompte). »
Pour les droits d’auteur perçus auprès d’éditeurs français en 2016, les cotisations sociales prélevées à la source sont les suivantes : sécurité sociale de 1,10%, CSG (Contribution sociale généralisée) de 7,50%, CRDS (Contribution du remboursement de la dette sociale) de 0,50% et CFP (Contribution à la formation professionnelle) de 0,35%. À noter que pour les droits d’auteur perçus à l’étranger, il n’y a pas de précompte et c’est à l’auteur de s’acquitter des cotisations sociales auprès de l’AGESSA.
Affiliation à l’AGESSA et assurance vieillesse
Nous avons vu que tous les auteurs sont assujettis à l’AGESSA (tous paient des cotisations), mais pas tous sont affiliés. Si vos droits d’auteur annuels atteignent le seuil d’affiliation (900 fois la valeur horaire du SMIC, soit 8 703 euros, en 2016), vous êtes alors affilié d’office à l’AGESSA pour la retraite de base (avec un taux d’assurance vieillesse de 6,90%) et à l’IRCEC (Caisse nationale de retraite complémentaire des artistes-auteurs) pour la retraite complémentaire. Le taux de cotisation au RAAP (Régime de retraite complémentaire) fixé pour 2017 à 5% des revenus perçus, évoluera progressivement pour atteindre, en 2020, le taux de 8% (voir le Guide de la retraite complémentaire de l’IRCEC).
La perception de droits d’auteur et l’affiliation à l’AGESSA sont compatibles avec toute autre activité professionnelle. Le site de l’AGESSA précise que « Dans le cas où vous avez plusieurs activités rémunératrices (activité artistique, activité commerciale ou indépendante, salariat, activité agricole…) : vous cotisez pour chacune d’elles dans le régime correspondant, mais votre couverture sociale dépendra de celui où vous cotisez le plus. » Attention, seuls les auteurs affiliés peuvent bénéficier de la couverture sociale de l’AGESSA.
Fiscalité des droits d’auteur
« La fiscalité concerne tous les auteurs, qu’ils soient affiliés ou simplement assujettis, qu’ils perçoivent des revenus importants ou non de leur activité d’écrivain. La TVA et la déclaration d’impôt sur le revenu sont les deux sujets fiscaux essentiels qu’il convient pour un auteur d’appréhender sinon de pouvoir parfaitement maîtriser » avertit le Guide des auteurs de livres 2017 (page 69).
Le taux de TVA applicable aux droits d’auteur est de 10 %. le Code général des impôts (CGI) prévoit un dispositif de retenue à la source qui permet aux éditeurs de retenir sur le montant des droits d’auteur la TVA due par l’auteur et de la verser au Trésor public avec une déduction forfaitaire de 0,8 % de ce montant. La TVA est calculée sur la base du montant des droits d’auteur brut (avant déduction de l’ensemble des cotisations sociales). L’auteur peut renoncer à ce système de retenue à la source et gérer directement le paiement de la TVA. Voir pages 70-72 du Guide des auteurs de livres 2017.
En ce qui concerne l’impôt sur le revenu, les droits d’auteur, qu’ils soient perçus en France ou à l’étranger, peuvent être déclarés en « traitements et salaires » lorsqu’ils sont intégralement déclarés par des tiers ou dans la catégorie des « bénéfices non commerciaux » (BNC) dans le cas contraire ou si l’auteur en fait le choix. La première option est la plus simple, mais pas nécessairement la plus intéressante économiquement. Dans les deux cas, il est possible de demander l’étalement des revenus sur plusieurs années d’imposition. Voir pages 72-76 du Guide des auteurs de livres 2017.
Un auteur doit normalement se déclarer auprès du Centre de formalités des entreprises (CFE) de l’URSSAF dont dépend son domicile, ce qui entraîne l’attribution d’un numéro de SIRET. Cette déclaration n’est cependant pas obligatoire dans le cas où l’auteur déclare fiscalement ses droits d’auteur en traitements et salaires et les cotisations sociales sont précomptées et versées directement par des tiers auprès de l’AGESSA.
Dans le prochain article, nous nous intéresserons au cas des revenus de l’écriture autres que les droits d’auteur.
À bientôt,
Frédéric Buffa